Les friperies : les deux revers de la médaille

Texte par Rosemarie Pilon et caricatures par Océane St-Onge

Après plusieurs soulèvements, incluant la récente grève environnementale qui a eu lieu le 15 mars dernier, les problèmes concernant l’état de notre planète se font beaucoup plus primordiaux et les actions pour atteindre un monde en santé s’actualisent grandement. Or, si l’on se pose sur un problème spécifique qui nécessite un mouvement de communauté des plus urgents, ce serait probablement la fabrication des vêtements importés qui se logerait dans la liste des polluants en vedette. Alors que 25% de tous les pesticides et 10% des engrais employés sur la planète sont réservés à la culture du coton, ressource importante pour la création de nos habits, les produits chimiques ne cessent de se propager sur nos territoires, nos cours d’eau et au final, sur nous-mêmes. Ces statistiques, qui paraissent considérablement élevées, ont déjà été diminuées par les trouvailles populaires des friperies qui, pour plusieurs personnes aujourd’hui, sont des lieux priorisés pour l’achat de tenues. Toutefois, malgré les atouts économiques et écologiques de ce genre de boutiques, comme dans n’importe quelle sphère de la vie, un côté sombre s’y trouve aussi.

C’est une idée ingénieuse qu’est la réutilisation des vêtements et elle devrait même être prônée, sachant que les Nord-américains jettent annuellement environ 9.5 millions d’habits qui se retrouvent dans des sites d’enfouissement, alors qu’ils auraient bien pu être récupérés. Cependant, cette récolte de vêtements usagés n’interrompt pas du tout le processus de fabrication vestimentaire parfois insalubre des usines majoritairement orientales. Des moyens concrets sont essentiels pour l’avenir de notre terre et de notre qualité de vie, car, en plus, le Canadien moyen se voit jeter environ 37 kilogrammes de vêtements aux poubelles chaque année. En prenant conscience que dans plusieurs pays, même en 2019, des populations ont à peine de quoi se couvrir, nos surplus de tissus paraissent encore plus illogiquement gaspillés. Évidemment, l’encouragement des producteurs et de leurs créations locales devrait être valorisé. Même si cette initiative n’apaise pas tout à fait la production exacerbée, elle vient soutenir les friperies. Les coûts sont élevés pour les produits locaux, mais pour des civilisations durables, rien n’est mieux qu’une consommation durable. En outre, cela éviterait, évidemment, la quantité énorme d’employés sous-payés aux conditions de travail misérables, notamment au Bangladesh, où un immeuble de production de vêtements s’est écroulé, causant la mort de plusieurs travailleurs il y a quelques années.

La plupart du temps, les habits dans les friperies sont extrêmement abordables, surtout grâce à l’arrivage constant de sacs remplis de vêtements de toutes sortes et déjà portés par des membres de la communauté. Toutefois, pour les employés qui travaillent dans ces commerces, il est parfois répugnant et révoltant de faire le tri des dons. Alors qu’il peut y avoir des sacs composés de magnifiques robes ou bien de complets éclatants, les travailleurs y retrouvent fréquemment des taches de sang et même des seringues. Les odeurs sont étouffantes, surtout quand certains employés retrouvent des excréments sur les habits ou dans les sacs reçus. De plus, il peut même arriver que des armes comme des revolvers s’y trouvent. Outre la dictature et l’abus de pouvoir qu’exercent les dirigeants de compagnies sur leurs employés dans plusieurs des pays orientaux, il ne faut pas oublier l’inhumanité se trouvant aussi dans notre société québécoise à travers ces sacs de « dons ». Ce genre de situation nécessite une nouvelle procédure, un nouveau fonctionnement en ce qui concerne ces pénibles transmissions. Ainsi, pour l’environnement, il serait, par exemple, pertinent d’utiliser des boites de plastique et préférable de les prendre transparentes, pour facilement discerner tout ce qui peut s’y trouver. Sans oublier qu’un commis, ou un autre, pourrait faire le tri efficacement en s’assurant de garder des produits salubres et sécuritaires dans le commerce, et ce, devant le client qui offre ses vieux habits.

Somme toute, les actions concrètes et réfléchies constituent une issue des plus essentielles pour notre planète et notre avenir. Les friperies sont des facteurs précieux pour une évolution positive de l’état de nos terres et de nos sociétés. Toutefois, il faut toujours garder en tête que ces actes écologiques et économiques ne doivent pas se transformer en phénomènes puérils, cela se traduisant en une source de moqueries ou de dangers pour maintes personnes qui tentent simplement de faire leur travail.